Dans la chaleur de Rabat, une vieille Fiat Ritmo pilotée par un chauffeur en maillot de foot roule à vive allure vers la médina. Les poignées des fenêtres sont cassées, la climatisation inexistante, la température intérieure avoisine les 30 degrés. Le poste de radio fonctionne et entonne, moitié en arabe, moitié en français, l’actualité du jour : « Ce soir, le festival Mawazine reçoit Bruno Mars, le chanteur… »
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Mercredi 27 juin, il est 19 heures. Devant le théâtre national Mohammed‑V, la petite bourgeoisie locale et les journalistes d’Afrique et d’ailleurs attendent pour écouter Souad Massi. Le lieu à la décoration orientale est plein quand la musicienne algérienne fait son apparition. Son sourire irradie et sa voix laisse l’assemblée bouche bée pendant qu’à l’extérieur les hommes de la sécurité refoulent ceux qui tentent d’entrer sans billet. L’accès à cette salle, contrairement aux quatre grands espaces ouverts, est payant.
Bruno Mars a débarqué avec une équipe de 70 larrons. Personne n’entrera en coulisses aujourd’hui
A l’autre bout de la ville, là où est installée l’OLM Souissi, scène internationale, l’ambiance est électrique. Bruno Mars a débarqué avec une équipe de 70 larrons. Personne n’entrera en coulisses aujourd’hui. Pas même les organisateurs. Aucun photographe n’aura accès aux crash barrières et, dans la foule, aucun appareil photo ne sera autorisé. Pas de cadeau pour cette première de l’artiste au Maroc. Au même moment, inconscient de ce qui agace en backstage, le public s’amasse sur la grande étendue pour avoir une chance d’apercevoir l’interprète.
Ce soir, 85 000 personnes seront présentes, l’équivalent d’un stade – ce chiffre est pourtant loin du record de Damso en début de semaine (110 000). Une audience familiale, plutôt féminine, même si beaucoup d’hommes ont emmené leur progéniture se trémousser sur « Uptown Funk ». Et le show aura largement valu le ramdam autour de la star qui sait comment se faire pardonner…
Après le concert, le Sofitel voisin grouille de fans qui espèrent croiser leur idole. Pas de bol pour eux, la star américaine est repartie aussi sec à Paris pour préparer sa venue au Stade de France. En revanche, le groupe Texas est arrivé et s’éclate au bar.
Jeudi, 17 h 30. Nouvelle virée en carriole pour rejoindre un des spectacles de rue de musique traditionnelle qui constituent le off du festival. Une des artères principales de la ville est bloquée par deux camions pendant que des acrobates font leur numéro sur la route. Les Klaxon retentissent alors que les voitures et les passants s’entassent derrière ces joyeux manifestants. Pas de stress, c’est le Maroc, ce pays où, quand on demande au chauffeur combien il faudra de temps pour arriver à destination, celui-ci répond : « Inch’Allah. »
A la nuit tombée, c’est le Canadien The Weeknd qui investit l’OLM devant une nuée adolescente
En fin de journée, Sharleen Spiteri et les drôles de garçons de Texas traînent en coulisses avant leur show. Le buffet propose ces pâtisseries locales qui dégoulinent de miel. Installée dans un canapé, Spiteri boit un thé à la menthe ; les musiciens font des essayages. Un escalier donne sur une passerelle éclairée par des lampes marocaines qui mène à la scène. C’est là que Sharleen viendra chercher une guitare presque aussi grande qu’elle entre deux chansons. C’est aussi là que le groupe reprendra son souffle pendant que les 4 000 spectateurs de la soirée patienteront entre la première partie délurée et le rappel.
Le lendemain, le long du fleuve Bouregreg, des dizaines de gamins se jettent à l’eau pour échapper à la chaleur. Au loin, la scène dédiée à la musique africaine résonne sous le soundcheck de Seun Kuti et son groupe. Le Nigérian chahute avec son percussionniste comme un enfant pendant que trompettistes et saxophonistes s’échauffent. Une chanson est testée et donne un avant-goût de la performance endiablée de la soirée.
A la nuit tombée, c’est le Canadien The Weeknd qui investit l’OLM devant une nuée adolescente. Demain, pour clôturer cette 17e édition, les habitants se déhancheront sur la pop orientale d’Ahlam ou sur Luis Fonsi et sa célébrissime « Despacito », en attendant l’année prochaine… si Dieu le veut.
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